TRAITER LE REFLUX

Le reflux, une histoire de « clapet ouvert »

Occasionnellement, en cas de vomissement par exemple, nous réalisons combien le contenu de notre estomac est irritant! C’est cette acidité, presque caustique, qui permet de liquéfier nos aliments pour leur digestion intestinale.

Naturellement, nous possédons une barrière contre le reflux, assurée par un muscle, appelé ‘sphincter’. Il permet d’éviter que l’acidité produite par l’estomac ne remonte vers notre bouche ou nos poumons.

Dans certains cas, le sphincter est défaillant. Il s’ouvre en-dehors des repas, on parle de « béance cardiale », ou plus communément de « clapet ouvert ».

La conséquence est une brûlure chronique de l’œsophage.

Cette situation est bien connue chez le nourrisson, car son sphincter est immature. Il présente des régurgitations la nuit.

Et la hernie hiatale, c’est quoi?

Il s’agit d’une partie de l’estomac qui glisse au-dessus du diaphragme.

Le plus souvent une hernie hiatale est de petite taille et est asymptomatique.

Elle évolue naturellement vers un reflux acide et grandit progressivement en taille au cours des années, le reflux est alors permanent.

En cas de hernie volumineuse, une grande partie de l’estomac peut passer dans le thorax entraînant une gêne respiratoire, des difficultés pour avaler et dans de rares cas une torsion de l’estomac.

Comment détecte-t-on une oesophagite?

Les blessures acides de l’oesophage sont bien visibles à l’endoscopie (caméra).      

L’examen est réalisé par un gastroentérologue, sous anesthésie locale de l’arrière gorge ou sous anesthésie générale (simple sédation).

Grâce à la caméra, les lésions liées à la brûlure acide de l’oesophage sont visibles sous forme d’ulcérations de la muqueuse (taches rouges).

On parle d’oesophagite peptique.

Il existe différents grades d’oesophagite selon le degré d’atteinte ulcéreuse, le grade A étant débutant, le grade B modéré et les grades C et D avancés.

Des biopsies sont toujours réalisées afin d’exclure toute dégénérescence cancéreuse liée à l’exposition acide.

De même, une bactérie est recherchée dans les prélèvements. Il s’agit de l’hélicobacter pylori. Elle  sera traitée conjointement au reflux par un traitement antibiotique.

En cas d’hernie hiatale large à l’endoscopie, il faudra réaliser d’autres examens :

  1. une radiographie de transit oesophagien (radiographie avec un produit à avaler, non douloureux).
  2. une manométrie oesophagienne (mesure de pressions de l’oesophage à la recherche d’un trouble moteur).,

On estime que 10 à 30% de la population est incommodée par des épisodes de reflux occasionnels, sans réelle cause.

Cependant, certaines circonstances peuvent induire du brûlant, parmi celles-ci :

  • L'obésité
  • La grossesse
  • Les efforts abdominaux importants ( en cas de toux ou de constipation, de port de charges lourdes, certains sports,...)
  • Certains médicaments comme les hormones (progestatifs), les médicaments utilisés dans les maladies cardiovasculaires ( dérivés nitrés, inhibiteurs calciques)
  • La consommation régulière d'alcool, de café, de boissons gazeuses, d'épices,...

La manifestation la plus fréquente est une sensation de brûlure dans le thorax, survenant généralement en position couchée (la nuit) ou penchée en avant (en laçant ses chaussure p.ex)

Parfois, les patients signalent des régurgitations acides ou alimentaires (sans nausées), une toux chronique, des signes ORL (laryngite, pharyngite, angine) voire même des douleurs thoraciques mimant de l’angine de poitrine.

Certains patients ne ressentent aucun reflux, notamment en cas d’obésité ou de diabète. Les lésions de l’oesophage sont découvertes par hasard, lors d’un contrôle d’endoscopie (caméra).

Rarement, le reflux se manifeste par un saignement (vomissements sanglants, selles noires ou anémie à la prise de sang) ou par des difficultés à s’alimenter.

Chez les nourrissons, le reflux disparaît généralement entre 6 et 12 mois, lorsque l’enfant grandit.

La majorité des adultes, eux, évoluent vers du reflux chronique. Les traitements médicamenteux offrent le plus souvent un soulagement complet, mais temporaire, des symptômes. Ils ne permettent pas de guérir la maladie.

Une chirurgie est proposée dans les situations suivantes:

  • Chez les jeunes adultes : afin d'éviter les traitements médicamenteux à vie et leurs effets secondaires. NB/ Les antiacides (pantomed, nexiam, oméprazole,...) donnés au long court sont potentiellement délétères (lésions osseuses, infections digestives ou pulmonaires, mauvaise absorption du magnésium, du zinc, de la vitamine B12, ...). On peut parfois observer un effet rebound (acidité plus importante dès l'arrêt du traitement) ou une dépendance.
  • En cas d'inefficacité du traitement médical (symptômes persistants ou récidivant immédiatement à l'arrêt du traitement) ou en cas d'effets secondaires des anti-acides (diarrhées, nausées, douleurs abdominales, maux de tête,...)
  • En cas d'hernie hiatale, la chirurgie étant le seul moyen de corriger l'anomalie anatomique responsable du reflux.
  • En cas de symptômes non digestifs (difficultés à respirer, douleurs thoraciques, occlusion, anémie…).
  • En cas de lésion précancéreuse de l’oesophage (Barett).​

L’intervention anti-reflux la plus commune est appelée FUNDOPLICATURE SELON NISSEN.

Cette chirurgie est toujours réalisée par de 4 mini- incisions de 1 cm (laparoscopie).
Elle nécessite de gonfler le ventre avec un gaz, sous anesthésie générale.

La durée opératoire est de moins d’une heure.

Le geste chirurgical contient 2 étapes:

  • La partie de l’estomac qui est montée dans le thorax (hernie hiatale) est ramenée en position normale dans le ventre. Ensuite, le trou par lequel l’estomac était remonté est fermé à l’aide d’un fil.
  • La partie haute de l’estomac, appelée « fundus », est utilisée pour être enroulée autour de la partie basse de l’oesophage, comme une cravate. On parle de FUNDO- plicature. Cette valve se gonfle d’air et empêche les remontées acides.

Je réalise l’opération en hôpital de jour ou en séjour d’une nuit, la chirurgie étant une procédure sans ouverture de l’estomac et donc sans risque.

Le montage chirurgical est efficace dans plus de 95% des cas. Il permet la disparition des symptômes de reflux et l’arrêt complet des traitements médicamenteux.

Les douleurs sont minimes, la durée d’arrêt de travail est d’une semaine. Par contre, les efforts abdominaux doivent être limités le premier mois (p ex: porter des charges, faire du sport, pousser pour aller à selle, ..)

La reprise de l’alimentation est immédiate, dès le soir de l’opération.

La difficulté à la déglutition est pratiquement systématique au début du fait de la transformation de l’anatomie et de l’inflammation des tissus opérés. Les aliments empruntaient un boulevard alors que maintenant il y a un « entonnoir » qui va progressivement s’élargir et permettre une alimentation normale.

Il est donc important, au début, d’apporter une attention particulière au moment des repas : de bien mâcher, faire des petites bouchées puis progressivement en fonction de l’amélioration des troubles les repas deviennent normaux. Il faut souvent entre 2 et 3 mois pour retrouver des sensations normales. Pendant cette période, les repas pris trop rapidement ont toutes les chances de favoriser les sensations de blocages.

Certains conseils sont donnés pour assurer un confort optimal pendant cet intervalle postopératoire:

  • Débuter par une alimentation liquide, puis élargir progressivement vers un régime ordinaire, pris par petites bouchées, bien mastiquées. Les repas sont fractionnés en 4 à 6 prises/jour.
  • Eviter de boire 30 minutes avant et après le repas. Tant que possible, éviter les boissons gazeuses.
  • Réduire la consommation des substances qui diminuent le tonus du sphincter anti- reflux tels que l’alcool, la caféine mais aussi le tabac.
  • Modérer la prise d’aliments ralentissant la vidange gastrique (fritures, épices, chocolat, pain très frais, café au lait ou lait à jeun, concombre, oignons crus, ail, poivrons, agrumes, cornichons,...)
  • Eviter, les deux premiers mois, les aliments indigestes et fibreux comme certaines viandes (carbonade, steak,...) et légumes (crudités, asperges,...)

D’autres inconvénients peuvent survenir, comme après toute intervention chirurgicale. Elles sont sans conséquence et n’empêchent pas de reprendre une vie et une activité normales :

  • Une petite distension du ventre liée à l’injection de C02 et à la dissection.
  • Des inconforts aux épaules liées aussi aux gaz utilisés pour la laparoscopie. Elles ne sont pas systématiques et disparaissent après 48h.
  • une sensibilité au niveau des incisions, voire un éventuel hématome. Cette gêne sera essentiellement présente lors des efforts musculaires et disparaitra spontanément. Les incisions sont de petite taille (1 cm). Leur cicatrisation est rapide.
  • des troubles digestifs : inconfort alimentaire, hocquet, ballonnement abdominal, transit rapide. Il se rencontrent au début et disparaissent en général progressivement.
  • Petite particularité: il est difficile de vomir ou de roter après une intervention de Nissen. Ce phénomène est lié à l’efficacité de la valve anti-reflux. Il explique aussi pourquoi après l’opération les gaz et les ballonnements sont, au début, un peu plus fréquents.
  • un dumping syndrome, c’est à dire des malaises au moment des repas, surtout au repas de midi, avec sueurs, bouffées de chaleur, céphalées, diarrhée obligeant le patient à s’allonger une demi-heure, est de survenue exceptionnelle. L’amélioration passe par une fragmentation des repas et une alimentation riche en fibres.
  • une perte de poids (en moyenne 5 kilos) est observée après l’opération, liée à l’alimentation souvent moins abondante au début.

Au long cours

On admet qu’il y a 5 % de récidive à 5 ans et 10 % à 10 ans. Dans ces cas un simple traitement médical peut suffir à guérir les troubles, il est aussi possible de ré opérer en principe par cœlioscopie.

D’autres opérations existent.
Elles ne seront qu’énumérées car réalisées au cas par cas.

Il s’agit notamment du by-pass gastrique (proposé en cas de reflux chez le sujet obèse) ou de l’intervention de Toupet (une variante de la fundoplicature de Nissen, proposée en cas de trouble moteur de l’oesophage afin de ne pas causer d’inconfort).